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GLYPHOSATE
Retour à la raison ou simple sursis ?

Fin 2022, l’Europe autorisera-t-elle le renouvellement de la molécule glyphosate ou au contraire, à la suite des pressions idéologiques, une minorité de blocage l’interdira-t-elle ? Les positions du gouvernement français sont moins déséquilibrées mais restent inquiétantes.

La profession s’interroge. La position des pouvoirs publics français évolue vers plus de réalisme. Comme l’a expliqué Emmanuel Marcon lors de son interview à Brut le 4 décembre (1), l’interdiction totale uniquement en France n’est plus d’actualité : « quand on veut lutter contre les pesticides, c’est l’Europe le bon niveau ». Mais la ligne directrice est toujours l’interdiction. Deviendra-t-elle effective en 2023 ?

UNE MINORITÉ DE BLOCAGE

En 2016 et 2017 avec Ségolène Royal puis Nicolas Hulot aux commandes, la France avait été très active pour obtenir l’interdiction. Avec la majorité qualifiée, il suffit que 12 pays (45 %), ou au moins 4 regroupant 35 % de la population, votent contre ou s’abstiennent pour bloquer une décision de renouvellement.

Les ONG, organisées à l’échelle internationale, avaient ciblé les pays peu concernés par le glyphosate, plus la France, l’Italie et l’Allemagne pour leur poids démographique. Résultat : 9 votes contre et une abstention. Mais l’Allemagne avait voté pour et la manœuvre des ONG et du gouvernement français avait échoué. Pour les AMM (autorisation de mise sur le marché), ce sont les agences (Anses) qui décident. Le cadre européen indique qu’elles ne peuvent interdire que s’il existe des solutions avec un impact économique faible. D’où la décision de l’Anses fin octobre, qui vient d’être attaquée en justice par Générations futures.

A l’inverse, le vote des ministres sur le renouvellement peut être basé sur des positions politiques faisant fi de l’avis des agences et de la réalité du terrain. Les militants anti-glyphosate ne cherchent donc pas à persuader les agences, ils portent même plainte contre elles pour les discréditer. Ils manœuvrent pour convaincre l’opinion afin que, par pensées électoralistes, les responsables politiques déclarent que « c’est une demande sociétale ».

En 2022, même si l’expertise des agences confirme la non-dangerosité, une minorité a le pouvoir d’entraver le renouvellement. Bien que leurs arguments fallacieux (les pseudo tests de traces de glyphosate dans les urines) aient été démasqués par la profession, les ONG vont relancer une campagne de manipulation de l’opinion avec le concours d’une partie de la classe politique. Le risque d’une interdiction en 2022, liée par exemple à un accord électoral dans plusieurs pays dont l’Allemagne, reste très plausible. Il faudra donc, au minimum, que la France vote pour le renouvellement en pleine campagne électorale. Qu’en sera-t-il ?

LA POSITION D’EMMANUEL MACRON ÉVOLUE

En France, l’arbitrage se fera à l’Elysée. La profession est donc très attentive à l’évolution des déclarations du président de la République. Le 27 novembre 2017, au soir de son échec à Bruxelles, dans la fougue de l’action médiatique, il avait twitté « avoir demandé au gouvernement de prendre les dispositions nécessaires pour que l’utilisation du glyphosate soit interdite en France dès que des alternatives auront été trouvées et au plus tard dans trois ans. Et, en mars 2018, lors d’un échange houleux avec un agriculteur au salon de l’agriculture, il affirmait : « Aucun rapport ne dit que ce n’est pas dangereux, il y en a qui disent que c’est dangereux, d’autres moyennement dangereux. »Depuis, la profession, les scientifiques et les parlementaires ont inlassablement rappelé les expertises unanimes des 11 agences mondiales.

La position du chef de l’Etat évolue. Le 29 janvier 2019, lors d’un débat avec les gilets jaunes dans la Drôme, il indiquait : « Il n’y a aucun rapport indépendant qui indique que c’est mortel ». Interrogé à nouveau le 4 décembre 2020, il expliquait : « Ce n’est pas le pire, ce n’est pas le plus dangereux et de très loin ». Il rappelait aussi les conséquences d’une l’interdiction : « débroussailler à la main ou à la machine. Ce sont des dizaines d’heures de plus par semaine. C’est un investissement qui n’est pas compensé. Et parfois c’est impossible car il n’y a pas de vraie solution. »

QUEL AVENIR ?

Michel Vaudour, responsable du groupe glyphosate pour la FRSEA CVL et du collectif « notrefuturdansleschamps » (2), s’interroge sur ce que sera la position française en 2022. Faut-il être un peu optimiste ? « En effet, les décideurs politiques français ne savent pas dire je n’avais pas tous les éléments initialement, ma position a changé. Mais malgré tout, ils ont compris la situation et, pour finir, la France votera pour le renouvellement européen en restreignant les AMM en France. Ce, sous réserve d’une baisse significative de l’utilisation ? »

Ou faut-il au contraire rester très inquiets. Emmanuel Macron déclarait le 4 décembre : « Je n’ai pas changé d’avis. Je suis pour que l’on en sorte », et le ministre de l’agriculture parle toujours d’un « plan de sortie du glyphosate » en réponse aux questions à l’Assemble nationale (1). « Comme les ONG trouveront toujours à mettre en exergue des études marginales pour prétendre qu’il y a un problème sanitaire, il faut malheureusement craindre ce scénario d’une position électoraliste. Il faut donc continuer à se battre en s’appuyant sur les experts des agences et en dénonçant la catastrophe économique et le non-sens agroenvironnemental d’une interdiction, comme viennent de le faire les vignerons du Languedoc.

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